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orientexpress

15 novembre 2007

Compagnon de 50 ans

Le 7 novembre dernier, la mythique Trabant a soufflé ses 50 bougies. Grand moment d'émotion pour les quelques milliers d'heureux détenteurs de ce véhicule de légende, - on en compterait aujourd'hui environ 90 000 - et surtout pour des générations d'Allemands et de Hongrois pour qui elle fut le symbole d'évasion et de la liberté. Après l'Allemagne de l'est, berceau de la "Trabi", c'est en effet en Hongrie qu'elle fut le plus vendue car, en vertu de la division du travail à la soviétique, seule la Hongrie ne fabriquait pas de voitures: les Pologne fabriquait la Polski, les Tchécoslovaquie la Skoda, la Roumanie la Dacia, la Russie la Lada, et la Yougoslavie la Yugo. Les Hongrois, eux, fabriquaient des Poids-Lourds, de marque Ikarus. C'est donc à Zwickau, dans le sud de l'ex-RDA, tout près de la frontière tchèque, que fut fabriquée la Trabant, et le premier exemplaire sortit des chaînes le 7 novembre 1957, jour de l'anniversaire de la Révolution russe. Il fallait alors 400 heures pour fabriquer un véhicule. Contrairement à un idée reçue, Trabant - qui signifie en allemand satellite, eh oui, 1957 est aussi l'année du Spoutnik !- n'est pas une marque, mais un modèle parmi d'autre de la marque Sachsenring, fondée au début du siècle par l'ingénieur allemand August Horch sous le nom de "August Horch & Cie", puis qui changea plusieurs fois de nom jusqu' à sa nationalisation en 1946. En 1947, le parti décide de la construction d'un véhicule populaire, qui devait à être à l'Est ce que la Volkswagen était à la zone Ouest (la distinction RFA/RDA date de 1949).Le cahier des charges était simple: 4 places adulte, entretien minimum, longue durée de vie. Pour faire face à la pénurie de matières premières, et notamment d'acier, les ingénieurs conçoivent la carrosserie en "Duroplast", toiles de coton enduites de phénol, un dérivé du charbon, et qui leur donne la rigidité nécessaire. Moteur 2 temps, couleurs en fonction des stocks de peinture disponibles, temps moyen de livraison: 12 ans. Très peu de restylage depuis la version de 1964; l'intérieur de la voiture étant le seul endroit où on ne pouvait être surveillé, il ne fallait surtout pas que la voiture devienne agréable à "habiter". On s'est beaucoup moqué, surtout à l'ouest, de la Trabant. Florilège: Quelle est la différence entre une Trabant et les témoins de Jéhovah ? Avec les Témoins de Jéhovah, vous pouvez fermer la porte. Pourquoi le dernier modèle de Trabant est-il nommé 601 ? Pour : 600 commandes, 1 seule livraison. C'est un gars qui arrive en marchant dans une station-service et qui demande : - Je pourrai avoir un jerrycan d'essence pour ma Trabant ? Et le pompiste lui répond : - Mouais... ça me paraît être un bon troc. Et pourtant, elle n'avait rien de ridicule; la 601 de 1964 étant plus puissante que la 2CV, et moins gourmande qu'une R4 à performances comparables; et puis ce fut le premier véhicule à carrosserie synthétique, comme la Méhari quelques années plus tard. Le 30 avril 1991, la dernière TRABANT sort de l'usine de Zwickau . Elle porte le numéro de châssis 3 069 099. Parmi ces 3 millions d'exemplaires vendus, 34 000 environ furent exportées "à l'ouest" dont 16 000 au Pays-Bas, 11 000 en Scandinavie, 949 en RFA, et 252 en... Equateur. Pour les aficionados, l'excellent www.eurotrabi.com regorge de détails savoureux sur la Trabant et ses cousines de l'est. Je vous le recommande, on voit qu'on y a à faire à des vrais passionnés. C'est drôle, tendre, et en même temps plein d'informations techniques.
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14 novembre 2007

jour de grève aujourd'hui en France

Je suis en province, et je ne prends pas les transports en communs, donc je peux me permettre d'en rire... L'institutrice présente à la classe un nouvel élève: Sakiro Suzuki. Le cours commence. L'institutrice : - Bon, voyons qui maîtrise l'histoire de la culture franco-américaine. Qui a dit : DONNEZ-MOI LA LIBERTE OU LA MORT? Pas un murmure dans la salle. Suzuki lève la main - Patrick Henry, 1775, à Philadelphie. L'institutrice : - Très bien Suzuki! Et qui a dit : L'ETAT EST LE PEUPLE, LE PEUPLE NE PEUT PAS SOMBRER? Suzuki lève la main : - Abraham Lincoln, 1863 à Washington. L'institutrice : - Excellent, Suzuki! Maintenant, qui à dit : Je vous ai compris? Suzuki lève la main et dit : - Charles DE GAULLE! L'institutrice regarde les élèves et dit : - Honte a vous! Suzuki est Japonais et il connaît l'histoire française et américaine mieux que vous! On entend alors une petite voix au fond de la classe : Allez tous vous faire f..., connards de Japonais ! - Qui a dit ça ? S'insurge l'institutrice. Suzuki lève la main et sans attendre, dit : - Général Mc Arthur, 1942, au Canal de Panama et Lee lacocca, 1982, lors de l'assemblée générale de General Motors.. Dans la classe plongée dans le silence, on entend un discret : - Y'm'fait vomir... L'institutrice hurle : - Qui a dit ça ? Et Suzuki répond : - George Bush Senior au premier Ministre Tanaka pendant un dîner officiel à Tokyo en 1991. Un des élèves se lève alors et crie : - Pomp'moi l'gland !!! Et Suzuki, sans sourciller : - Bill Clinton à Monica Lewinsky, 1997 dans la salle ovale de la Maison Blanche, à Washington. Un autre élève lui hurle alors : - Suzuki, espèce de merde ! Et Suzuki : Valentino Rossi, lors du Grand Prix de Moto en Afrique du Sud en 2002... La salle tombe littéralement dans l'hystérie, l'institutrice perd connaissance, la porte s'ouvre et le directeur de l'école apparaît : - MERDE, je n'ai encore jamais vu un bordel pareil! Et Suzuki : - Louis Gallois en arrivant à la tête de la SNCF !!!...
12 novembre 2007

Le mythe du management, ou à quoi servent vraiment les écoles de commerce ?

Pour mieux filer vers l'Est, c'est plutôt de l'Ouest de Paris que nous débuterons notre périple, là où sévissent la plupart des victimes du billet d'humeur qui suit. Une humeur certes longtemps "intériorisée", mais un excellent article de Matthew Stewart, philosophe américain converti au management, et qui en est revenu, m'a révélé que je n'étais pas seul dans cette galère. Je lui dois donc ce coming-out.

Il faut bien le reconnaître : mes années d’Ecole de Commerce, pardon,… de « Business School », ne furent pas des plus amusantes. Ma première impression étaient que mes congénères devaient être excessivement candides, ou particulièrement désœuvrés, pour perdre plusieurs années de leur vie, souvent contracter de lourdes dettes, et ce à la seule fin de garder leur sérieux lorsqu’ils vous parlent « business process reengineering », glosent sur la « psychosociologie des organisations », ou vous conseillent d’adapter votre « data processing » pour devenir « a world class company » et faire face aux « nouvelles stratégies compétitives » de vos concurrents. A cours de ces 3 années, en parcourant péniblement la littérature spécialisée, dite « managériale », pas une fois je ne me suis dit « ça alors, si seulement j’avais su cela plus tôt ! », ou encore « ah, oui, vraiment, cela donne à réfléchir ». En lieu et place, je me suis surpris à penser des choses inavouables du type « je ferai mieux de lire Raymond Aron, Stefan Zweig, ou même Le Monde ». Déroutante expérience.

C’est en 1899 que la théorie du management fit irruption dans le monde moderne, par une question du célèbre Frederik W. Taylor, que la postérité retiendra comme le père fondateur de la science managériale : « combien de tonnes de fonte un travailleur peut-il charger dans un wagonnet en une journée ? » Pour parvenir à ses fins, il dévala dans une usine avec ses « hommes de l’Université », comme il nommait ses assistants, et constata que chaque individu chargeait 12,5 tonnes par jour, soit à peine la moitié des 80.000 tonnes nécessaires pour faire face à la demande engendrée par la guerre hispano-américaine. Il sélectionna alors dix forts et puissants hongrois ; moyennant hausse substantielle de leur salaire, ceux-ci manipulèrent 16,5 tonnes de fonte en 14 minutes. Taylor fit les comptes : sur une journée, cela donne 75 tonnes par personne. Il ajusta les résultats à la baisse de 40% pour tenir compte des pauses toilettes, déjeuner et détente, et fixa donc l’objectif à 47,5 tonnes par jour et par personne. Quand les hongrois réalisèrent qu’on leur demandait de quadrupler leur charge de travail, ils refusèrent de travailler. Taylor tomba alors sur un hollandais, dont il compara l’intelligence à celle d’un bœuf, et qui, moyennant une augmentation de 60% de son salaire, parvint à charger 46 tonnes de fonte. Ce fut suffisant pour marquer ce jour d’une pierre blanche : la première victoire des méthodes de management moderne. S’ensuivit la segmentation du travail entre ceux qui pensent (les têtes) et ceux qui exécutent (les bras), Taylor ayant montré qu’un même individu ne pouvait être apte aux deux à la fois.

A la demande de ses disciples, il baptisa sa méthode « management scientifique », que les étudiants apprennent sous le vocable « OST » pour « Organisation Scientifique du Travail ». Pourquoi pas. Sauf que la première caractéristique de ce qui veut se prévaloir du nom de science doit être la reproductibilité des résultats expérimentaux. Or, Taylor n’a jamais publié les données sur lesquelles il a fondé la science du chargement de la fonte ; par ailleurs, sommé d’expliquer le caractère « scientifique » de l’ajustement de 40%, fondement de sa théorie, Taylor mentionna avec l’aplomb désinvolte de l’expert que dans d’autres expériences, cet ajustement pouvait varier de 20% à 70%, justifiant ces écarts par son jugement et son expérience, alors même que tout raisonnement scientifique doit tendre à éliminer toute variable subjective. Ensuite, lorsqu’un membre du Congrès lui demanda si ses méthodes pouvaient être mal utilisées, Taylor hocha négativement la tête : si la Direction était dans de bonnes dispositions d’esprit, ses méthodes conduiraient toujours au résultat correct. Enfin, lorsqu’on s’aventurait à demander si son employeur la Bethlehem Steel avait tiré profit de ses travaux, il éluda la question. Et pour cause, il fut congédié en 1901, et ses ingénieuses recommandations oubliées. Au bout du compte, la méthode de Taylor se résume à une série de plates évidences du type : « travaillez plus vite », « organisez mieux votre travail », « soyez efficace ». Le cœur du taylorisme, comme de la plupart des méthodes de management qui lui succèderont, consiste en une collection d’incantations et d’anathèmes quasi mystiques sur l’avantage d’être bien organisé et bon dans son travail, le tout enveloppé dans de douillettes bulles de paraboles pompeusement appelées « études de cas », comme à la recherche d’une incertaine crédibilité.

Empreintes de vanité, les théories du management ne le sont pas tant par leurs carences en données empiriques fiables et leurs lieux communs, que par la quasi infaillibilité dont elles se prévalent. Vous posez-vous la question de savoir en quoi consiste exactement le BPR, « business process reingineering », dernière marotte du management moderne, vous obtiendrez des réponses lumineuses du type : le BPR consiste à remettre à plat tous les processus de l’entreprise, ou encore, le BPR, c’est comme recouvrir tout ce que vous savez d’une feuille blanche pour repartir de zéro. Prix de la prestation : 2000 EUR/jour. Serrer la main du consultant, lui demander si son voyage s’est bien passé, et lui offrir un café vous en coûtera déjà 50. Car, et c’est peut-être là le pire, le développement de ces théories a consacré un nouveau groupe social : la classe du management, faite d’experts en tout genre, enseignants, consultants, éditeurs, dont l’utilité sociale le dispute à la vacuité mentale, et dont la prise de risque frôle les fonds marins. Jouant sur la concurrence effrénée, misant sur les doutes et les craintes légitimes des dirigeants qu’ils se plaisent à amplifier, ces gourous cravatés sont devenus incontournables, se confortant dans l’idée que la demande des clients légitime leur activité. Comment McKinsey a-t-il pu facturer en toute impunité des millions d’honoraires de conseil à Enron dans les 18 mois qui ont précédé la retentissante faillite du géant du pétrole ? Mis à part le fait qu’il n’ y a pas eu d’enrichissement personnel ni de tromperie avérée, cette escroquerie là vaut largement les actes délictueux du PDG d’alors, lui-même ancien de …McKinsey.
Sans parler, dans un tout autre registre, de la rente limite indécente que constitue un poste d’enseignant en management dans une business school, garanti à vie moyennant un quota annuel de publications ésotériques. Le système s’auto entretient par ces étudiants cocoonés, rarement les moins brillants, dont la seule ambition est de devenir « enseignant-chercheur » au sein de l’établissement qui les a formés. « Chercheur en Sciences de Gestion », quelle incongruité ! Un passage par l’entreprise ? Mais pour quoi faire ? Vous n’y pensez pas ! Que pourrais-je y apprendre que je ne sache déjà ? L’un des fondements du capitalisme, du moins le pensai-je, consiste à rémunérer la prise de risque ; nous en sommes bien loin. D’ailleurs, les plans quinquennaux soviétiques n’ont-il pas été inspirés des travaux de l’ingénieur Henri L. Gantt, l’un des plus fidèles disciples de Taylor ? Amusant méandre de l’Histoire.
C’est dans la fonction publique française que ces spécialistes pourraient être réellement générateurs de progrès et d’efficacité en vue du bien de tous, mais, las, le client paye nettement moins bien, et surtout le risque d’échec existe réellement.

Et pourtant, on ne peut reprocher à cette nouvelle caste dominante d’avoir fait l’économie de l’effort intellectuel. Tous gardent en mémoire leurs chères années d’études en Ecole de Commerce, persuadés que ce cursus avait été utile à l’avancement de leur carrière. S’ils ont raison sur ce point, ce n’est pas grâce aux connaissances qu’ils y ont acquises, mais bien parce que, tel un tatouage sur un guerrier Maori ou un certificat d’origine sur de la viande bovine, le diplôme est un label commercial attestant que le titulaire, à une période déterminée de sa vie, a été capable de mettre en œuvre un savoir réel, mais qui n’aura rien à voir avec les aptitudes qu’il devra développer pour faire un bon dirigeant. Ensuite, mécaniquement, l’esprit de caste corrélé à l’aversion au risque des employeurs fera que, grosso modo, cet avantage mérité à 20 ans reste certain et acquis tout au long de la vie, tel une publicité à un cul de bus. Parmi les nombreux exercices proposés à la réflexion des étudiants de classes préparatoires figurait un sujet cocasse : « le concours : baptême bureaucratique du savoir ». Tout est dit.

Ce que les écoles de gestion ne peuvent apprendre, c’est que les diverses constructions échafaudées par les experts en management pour donner corps à leurs truismes (les « matrices » de résolution de problèmes, les analyses SWOT – eh oui : Strenghtes, Weaknesses, Oppotunities, Threats, enfin ! -) sont heuristiques par essence, c'est-à-dire qu’elles contribuent à la recherche et à la découverte des faits. Elles peuvent parfois aider à trouver des solutions et à les hiérarchiser, mais elles ne peuvent aider à penser ; et ce faisant continuent de générer un nombre ahurissant de mauvais auteurs. Il va de soi que certaines techniques doivent être maîtrisées, qui obéissent à des règles écrites et irréfutables - savoir analyser un bilan pour qui veut travailler dans une institution financière, connaître les principes du droit pour un juriste en entreprise, parler des langues étrangères pour qui veut travailler à l’import-export mais la valeur ajoutée de cet apprentissage est bien moins importante que ce que papa et maman veulent bien croire. Dans la plupart des emplois de direction ou d’encadrement, toutes les aptitudes nécessaires à la réussite soit sont des qualités strictement humaines (leadership, écoute, prise de risque) soit s’apprennent sur le tas. Car ce qui est demandé au dirigeant, c’est avant tout de savoir penser, raisonner avec bon sens et mesure, et de savoir faire fructifier ses expériences, y compris extra-professionnelles, - et celles de ses collaborateurs- en vue du bien commun.

Parfois, je me réjouis de découvrir dans quelque annuaire ou notice biographique l’existence discrète de M.X, diplômé d’HEC, et Docteur en Histoire. Celui-là mérite le respect ; qu’il frappe à ma porte, il sera écouté. En effet, là où l’historien ou le philosophe détiennent un avantage majeur sur leur lointain cousin des sciences managériales, c’est qu’ils sont bien meilleurs dans l’art de savoir ce qu’ils ignorent. Et ce savoir là est irremplaçable.

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